LE
RENOUVEAU
N°
365 du Jeudi 29 Juin 2000
L'EVENEMENT
NATIONAL
27
JUIN 2000 :
" DU PAIN, DE LA LIBERTE ET DU PROGRES ", RECLAME LE PEUPLE.
Un 27-Juin particulièrement lourd que celui-ci ! Un 27-Juin qui nous
trouve dans une situation sans précédent où misère
et musellement s'allient pour nous supplicier. Un 27-Juin où la Liberté
que l'on pensait recouvrer avec l'accession à l'Indépendance
voilà vingt-trois ans, brille par son absence. Où la misère
populaire point partout, insoutenable et anachronique dans un petit pays
d'à peine cinq cent mille habitants. Les familles ne se comptent
plus qui ne mettent plus de marmite sur le feu et la précarité
où survit la population rurale depuis plus de vingt ans, a précipité
pas moins de cent cinquante mille Djiboutiens, selon les propres chiffres
du gouvernement, dans les effets de la sécheresse. Un phénomène
dont nos prétendus gouvernants semblent d'ailleurs s'accommoder plutôt
bien et qui leur assure une aide alimentaire dont les " déperditions
" sur le chemin de ses destinataires atteignent souvent des proportions
insoupçonnées. La question de la distribution de l'aide alimentaire
est si sensible que Monsieur Ismaël Omar Guelleh a cru utile, dans
son allocution de mardi 27 juin 2000, de souligner que les " vivres
arriveront à toutes les localités ".
Voilà dans quel contexte national survient le 23ème anniversaire
de l'Indépendance nationale qu'un grand nombre de fils et filles
de ce pays, et non des moindres, ont payée de leur vie. Sans compter
tous ceux et toutes celles qui n'ont ménagé ni leur temps,
ni leur énergie, ni leurs biens pour qu'enfin le peuple djiboutien
émerge de la nuit coloniale.
C'est un pays en ruines, où la poussière est reine et les
habitants profondément marqués des stigmates de la misère
et de l'angoisse du lendemain, que trouve le 23ème anniversaire.
C'est un pays en état de déliquescence avancée, où
l'Etat n'existe que du nom et où seuls quelques grassouillets dignitaires
se rengorgent d'inconscience au volant de leurs grosses cylindrées,
toutes vitres hermétiquement fermées (cela pue dehors, n'est-ce
pas ?), quand ils ne se prélassent pas dans leurs villas honteusement
cossues ou leurs bureaux ridiculement luxueux.
C'est cette capitale, Djibouti-ville, qui fut coquette mais aujourd'hui
méconnaissable à force de mal-gouvernance, où l'on
respire les matières suspendues et boit une eau ignorant les normes
de potabilité, c'est cette ville que le nouveau Commissaire de la
République, Chef du district de Djibouti, appelle ses habitants à
embellir ! A qui s'adresse-t-il, Monsieur Daher Ismaël Kahin dit Chideh,
qui, depuis l'Indépendance, collectionne titres et terrains bâtis
? A ces travailleurs qui en sont à cinq mois d'arriérés
de solde pour la seule année 2000 (huit si l'on compte les trois
mois des années précédentes), à ces commerçants
frappés de plein fouet par cette interminable crise économique,
à ces mères de famille faméliques qui se saignent aux
quatre veines pour nourrir leurs enfants et que ses services déplacent
sans cesse sans les réconcilier avec la " tranquillité
publique ", aux malheureux habitants de Balbala que l'Indépendance
confisquée a rejetés à la dure périphérie
de la ville et qu'il gratifie d'un chantier personnel qui insulte à
leur misère ?
Sans précédent que ce 27-Juin où les agonisants sont
sommés de se redresser pour agrémenter la promenade de leurs
bourreaux. Surréaliste !
L'on comprendra alors pourquoi le pays n'a pas revêtu ses allures
de fête, que les Djiboutiennes et Djiboutiens n'ont pas envahi de
joie les rues et ruelles poussiéreuses et polluées. L'on comprendra
pourquoi, en dehors des feux d'artifice de l'alimentura aux environs du
26 juin à minuit, de la piètre parade militaire (les soldats
n'ont pas même perçu leur solde de février 2000 !),
du " dépôt de gerbe au Palais du Peuple " et de la
" réception " de Monsieur Guelleh à Beit El Wali
(ancien palais du gouverneur colonial), rien n'indiquait la fête nationale.
Les quelques endroits, aménagés par le sieur Chideh dans la
capitale, n'ont pas vu la foule se bousculer. Que ce soit devant le Palais
du Peuple, à Einguela, au deuxième arrondissement, devant
le collège d'enseignement secondaire d'Ambouli ou d'ailleurs, pas
grand-monde ne s'est déplacé. Seuls quelques dizaines de badauds
qui ne trouvaient pas le sommeil sont passés voir s'agiter les misérables
groupes folkloriques et autres artistes fauchés engagés pour
la circonstance.
A Balbala, les choses sont même allées très loin. L'estrade
installée par les services de Monsieur Chideh à cheik Moussa
sur un terrain vague près de la caserne des Pompiers a été
envahie par une foule en fureur. Les artistes engagés pour la circonstance
ont été chassés à coup de pierres et les forces
de l'ordre dépêchés sur les lieux pris à partis.
Aux cris de " Nin dhargay ayaa ciyaara !: Nous avons trop faim pour
danser et chanter ! ".
Bilan des affrontements : un mort et un blessé parmi les habitants
de Balbala. Le mort serait, selon nos informations, un jeune homme écrasé
par un véhicule dans la débandade. Le 27 juin 2000 a donc
son martyr.
La liesse populaire n'a donc pas été au rendez-vous. Loin
de cette marée humaine débordant d'enthousiasme qui a salué
le 27 juin 1977 l'avènement de l'Indépendance de tous les
espoirs. Loin de cette Indépendance qui a fait versé des larmes
de joie à Mohamed Ahmed Kassim dit Haissama, premier officier à
tenir le drapeau national ! Loin de cette Indépendance dont Mahamoud
Harbi avait rêvé, pour laquelle Ahmed Dini Ahmed, Moussa Ahmed
Idriss, Mohamed Ahmed Issa dit Cheiko, Aden Robleh, Omar Osman Rabeh, Dahan
et autre Djama Yacin, ont combattu et dont la lutte avait emporté
des vies aussi précieuses que Djanaleh, Hassan Gauliss, Abourahman
Djama Hassan dit Andoleh, Gashanleh, et j'en passe. Loin de la communion
historique dans la joie et la dignité.
Monsieur Ismaël Omar Guelleh saura-t-il lire comme il se doit ce 27-Juin
2000 et en tirer les conséquences qui s'imposent ? Saura-t-il muer
et cesser enfin de s'opposer à l'avènement pour son peuple
et son pays de cet Etat de droit, de justice, de démocratie, qu'il
dit pourtant vouloir pour la Somalie ?
L'avenir proche le dira, à en croire du moins l'allocution prononcée
par Monsieur Ismaël Omar Guelleh lors de la réception qu'il
a offerte dans les jardins de la présidence de la République
à l'occasion du 27-Juin 2000. Il a en effet parlé de convergence,
s'agissant des " discussions " autour de l'accord-cadre du 7 février
2000 à Paris entre le Front pour la Restauration de l'Unité
et de la Démocratie (FRUD) dirigé par le président
Ahmed Dini Ahmed et son gouvernement. Assurant que ces négociations
déboucheront " bientôt " sur une " vision unifiée
" et permettront, si tel est le cas, le renouveau démocratique
et la reprise du progrès dans la paix, la réconciliation et
la concorde.
L'avenir proche le dira, car, comme nous le rappelait l'autre soir à
Balbala un vieux Djiboutien plein de sagesse : " Been taada hore run
taada dambe ayay disha (tes mensonges passés ne servent pas tes vérités
à venir "). A voir alors.
Lire en fin de journal le communiqué de l'ODU consacré au
27-Juin.
ADMINISTRATION
ASSASSINAT
A BALBALA !
Samedi 24 juin 2000.
Il est aux environs de sept heures du matin et le soleil estival répand
déjà abondamment ses rayons sur le sol national. Daher Guedi
Foureh, jeune pasteur nomade, venu se ravitailler en vivres en ville, émerge
de son sommeil à la belle étoile, en même temps que
deux de ses compagnons. Devant un cabanon de bric et de broc dans les parages
du parc à bestiaux administratif de Balbala.
Brusquement, des bruits de bottes retentissent aux oreilles des trois nomades.
Ils se retournent et voient surgir deux agents des forces de l'ordre, armes
à la main. Ils sont sous les ordres d'un responsable de la brigade
des recettes(entendez contributions) indirectes en charge notamment de la
" lutte anti-contrebande ". Les deux agents armés se rapprochent
à grands pas de nos pasteurs qui, n'ayant rien à se reprocher,
ne comprennent point cette visite musclée. Etrange...
Il semble que le cabanon, qui les a vus passer la nuit à la belle
étoile, abrite une marchandise de contrebande, plus exactement trois
cartons de cigarettes illégalement introduites en territoire national
depuis le Somaliland voisin. Des cigarettes certainement en attente de départ
pour le marché djiboutien mais dont les pasteurs nomades n'ont aucune
idée. Eux qui ont passé la nuit où ils ont pu, comme
d'ordinaire, étrangers à toute contrebande, ne comprennent
rien à rien. Ils en arrivent même à prendre cela pour
de la provocation. Verbalement, le buste redressé sur leurs cartons
étalés à même le sol, ils protestent alors contre
l'attitude menaçante des agents des forces de l'ordre dont les armes
les visent. Excédé, Daher Guedi Foureh, neveu de Moussa Foureh,
artiste dessinateur en service au ministère du Logement et de l'Urbanisme,
demande à quitter les lieux, ce qu'approuvent ses compagnons. "
Puisque nous ne sommes pas des contrebandiers, nous n'avons rien à
faire ici sous la menace des armes ", se hasardent-ils.
C'est alors que l'un des deux policiers ouvre le feu. Tirant à bout
portant, il touche Daher Guedi Foureh sur le flanc et à la tête.
Le jeune pasteur nomade s'écroule sur le champs. Il meurt immédiatement
dans une mare de sang. Ses deux compagnons, pétrifiés de peur,
n'en croient pas leurs yeux ni leurs oreilles.
Tranquillement, l'agent des recettes indirectes et les policiers se détournent
des broussards pour le cabanon, abandonnant à son sort le corps de
Daher Guedi. Ils s'y introduisent pour en ressortir avec les trois cartons
de cigarettes de contrebande. Le butin à la main, ils repartent comme
s'ils sont venus. Sans le moindre remords.
La mort violente qu'ils viennent de faire subir à un innocent, ne
les émeut nullement. A croire qu'ils ont abattu un lapin ! Pour ces
individus se retranchant derrière le service public et dont d'aucuns
soutiennent qu'ils agissent souvent pour leur propre compte, la vie humaine
ne vaut-elle rien ? Pas même la balle qui leur permet de l'ôter
?
La nouvelle de l'assassinat se répand aussitôt comme une traînée
de poudre. Tout Balbala l'apprend qui la diffuse vers Djibouti. La pseudo-lutte
contre la contrebande a encore versé le sang. Elle a tué.
Elle a lâchement fauché un jeune innocent dans la fleur de
l'âge.
La famille de la victime l'apprend à son tour. Son oncle paternel
Moussa Foureh, mais aussi sa tante Basra Foureh, épouse du président
du GDR, Moumin Bahdon Farah. Daher Guedi Foureh, jeune homme plein de vie
et d'intelligence, aîné de sa famille, ne respire plus. Les
agents du régime l'auront assassiné, le visant comme une cible
d'exercice.
Au moment où nous mettons sous presse, l'assassin et ses complices
courent toujours. Pire, ils semblent ne rien risquer. Ainsi fonctionne le
pouvoir en place, arbitraire et assassin.
De sorte que feu Daher Guedi Foureh, à moins d'un changement rapide
et en profondeur, ne sera pas la dernière victime. Ni la première.
Le pouvoir en place ne broie-t-il pas du Djiboutien depuis le premier jour
?
Le président du PRD, Daher Ahmed Farah, le Bureau National ainsi
que les militants et sympathisants du Parti, le Haut Conseil de l'ODU et
son président Moussa Ahmed Idriss adressent leurs sincères
condoléances à la famille du défunt, en particulier
à son oncle Moussa Foureh et à sa tante Basra. Allah l'accueille
en son Paradis Eternel. Amin.
CIVISME
LETTRE
OUVERTE AU COMMISSAIRE DE LA REPUBLIQUE , CHEF DU DISTRICT DE DJIBOUTI
MONSIEUR DAHER ISMAEL KAHIN DIT CHIDEH *
par DAF
Cher concitoyen,
Je ne puis me retenir de saisir ma plume de pasteur nomade pour m'adresser
à cet autre pasteur nomade que vous êtes. Je me permets de
m'adresser à vous sur un sujet qui m'interpelle et me préoccupe.
Tout autant d'ailleurs que les autres consciences pastorales normalement
constituées.
Il s'agit du terrain sis à Balbala Cheik Moussa sur lequel, semble-t-il,
vous êtes en train d'édifier une jolie villa personnelle. Après
l'avoir entouré, non sans une certaine précipitation, d'un
haut mur d'enceinte ; ce qui vous laisse, une fois la villa achevée,
un espace assez vaste pour recevoir d'autres constructions.
Ce que je souhaite vous dire, cher aîné, c'est que vous suscitez
l'indignation générale. Tout Djibouti bruit de protestations,
auxquelles je souscris, contre votre chantier. Pour autant que je sache,
nos concitoyens sont unanimes à condamner votre construction pour
la simple raison que le terrain qui l'accueille appartiendrait à
l'Etat, plus exactement au ministère de l'Education Nationale qui
le destine à la réalisation d'un groupe scolaire. Ce serait
donc le terrain d'un équipement social que " vous vous seriez
attribué " pour reprendre l'expression souvent entendue à
votre endroit concernant cette parcelle.
J'avoue que cette affaire me révulse au plus haut point. Je vois
en effet l'avenir d'un enfant assassiné sous chaque parpaing du chantier
en question, si telle est la vérité. Pourquoi vouloir priver
notre progéniture de son école alors même que l'espace
libre abonde à Balbala ? D'autant que vous ne manquez pas de titre
fonciers. Je ne parviens pas à me l'expliquer. Un appétit
foncier, pour ne pas mercantile, exaspéré, comme je me le
laisse répéter partout où j'interroge sur les motivations
qui président à votre chantier ? Mais même cela doit
avoir des limites, si toutefois il correspond à la vérité
!
Cher aîné, je n'ai, moi, aucun titre foncier, encore moins
des revenus de rente ou de grosses cylindrées rutilantes à
air conditionné. Pour autant, je ne me porte point mal. Je suis même
très heureux.
C'est que le bonheur ne réside point dans l'accumulation matérielle
ni dans la fuite en avant. Il réside dans la paix intérieure
, dans cet accord avec soi-même visiblement si difficile à
réaliser pour certains.
" Ne fais ni ne tolère l'injustice ", nous enseigne la
sagesse pastorale, digne représentante de la conscience universelle.
Le Saint Coran le confirme qui commande de faire le bien et de se garder
du mal.
Cher concitoyen, loin de moi toute idée de vous seriner des leçons.
Je vous fais seulement part de mon sentiment. En prenant l'opinion nationale
et... internationale à témoin.
J'espère vivement que vous comprendrez le sens de ma démarche
et réagirez positivement.
Une telle réaction de votre part, outre qu'elle sauverait beaucoup
de nos enfants, vous grandirait, car elle apporterait la preuve que vous
n'êtes pas au-dessus de la loi, que vous avez du cur et que
vous êtes capable de ne pas persister dans l'erreur.
Très concitoyennement à vous.
*Avec mention spéciale
à Monsieur Ismaël Omar Guelleh, Chef de l'Etat.
REGIONALE
SABOTAGE
DU TRAIN ADDIS -DJIBOUTI :
L'ETHIOPIE REJETTE LA REVENDICATION DE L'OLF
Addis Abeba a qualifié
mercredi 21 juin de mensonge la revendication par les rebelles du Front
de Libération Oromo (OLF, séparatistes du sud-éthiopien)
de l'attentat commis le 17 juin contre un train de marchandises reliant
Addis Abeba à Djibouti.
" C'est un mensonge ", a déclaré à l'AFP,
Salomé Tadesse, porte-parole du gouvernement, réaffirmant
que " l'OLF est une organisation qui n'existe pas, seulement dans l'imaginaire
de certaines personnes ".
Le 17 juin, une bombe avait explosé à proximité de
la localité de Nazereth (99 km au sud d'Addis Abeba) au passage d'un
train de marchandises qui circulait en direction d'Awash (sud-est de l'Ethiopie),
sans faire ni victimes ni dégâts.
Dans un communiqué envoyé à l'AFP le 20 juin à
Nairobi, les rebelles ont expliqué avoir posé la mine qui
a fait dérailler le convoi.
Les séparatistes de l'OLF avaient annoncé leur intention de
multiplier les sabotages visant notamment " des voies de transport,
des cibles militaires et des centres économiques ".
Le ministère de la Défense avait annoncé le 19 août
1999 que l'armée éthiopienne avait totalement détruit
la rébellion armée de l'OLF après des combats près
des frontières Kenyane et Somalienne.
Mais, trois mois plus tard, l'explosion d'une mine au passage d'un train
de passagers avait tué deux conducteurs et sérieusement blessé
leur adjoint, également sur la ligne Addis Abeba-Djibouti, dans le
secteur reliant Dire Dawa (sud-est) et Addis Abeba.
Les autorités éthiopiennes avaient alors accusé l'Erythrée,
en guerre contre l'Ethiopie depuis mai 1998, d'avoir aidé l'OLF à
poser une mine.
ECONOMIE
LE
COMPTE A REBOURS
par AMA
(Le Temps, mensuel djiboutien, édition de juin 2000)
A Djibouti, depuis
la dernière tentation dynastique de Gouled, le temps est à
la désolation et à la déception.
La situation politique, économique et sociale est telle qu'il n'y
a plus de place à l'espoir. L'effondrement économique du pays
a déboussolé l'ensemble de la population djiboutienne, qui
a perdu ses repères. Il n'existe pas de statistiques sur le nombre
des sans-emplois mais les rues de Djibouti regorgent de chômeurs.
Le chômage (surtout parmi les jeunes générations) a
atteint des limites qui font craindre le pire. Il n'y a aucune perspective
d'emploi pour les flots de jeunes étudiants djiboutiens qui rentrent
chaque année au pays.
Les fonctionnaires et militaires sont sans solde depuis janvier 1999. Les
retraités attendent le paiement de leurs pensions depuis un an (4
trimestre). La misère qui galope dans les rues de Djibouti n'est
que la conséquence, de la corruption et de l'absence de volonté
des décideurs djiboutiens.
L'augmentation inconsidérée du prix des hydrocarbures, qui
est entrée en vigueur à la fin du mois dernier à Djibouti
suite à la hausse du prix de l'or noir sur les marchés mondiaux,
traduit le désarroi du pouvoir illégitime de l'héritier
de Gouled et sa gestion au jour le jour de l'économie.
En effet, l'envolée des cours du pétrole, qui a frisé
les trente dollars américains le baril, a été précédée
par une longue période de chute où le prix du baril est descendu
jusqu'à dix dollars Us.
La hausse du prix du pétrole a directement été répercutée
sur les prix à la consommation alors que la baisse n'a guère
bénéficié aux Djiboutiens. A qui a-t-elle alors profité
?
vous l'aurez compris, la logique de la prédation érigée
en système de gouvernance, obéit à d'autres lois qu'à
celles de l'économie. C'est dans ce cadre que s'inscrit la disparition
de l'Etablissement Public des Hydrocarbures (EPH), caisse de péréquation
et de stabilisation des prix des hydrocarbures.
Avec la liquidation de cet autre organisme au rôle vital qu'est l'Office
National d'Approvisionnement et de Commercialisation (ONAC), ce sont les
stocks d'approvisionnement (de quatre mois) des denrées alimentaires
de première nécessité (tel que la farine, le sucre...)
qui disparaissent.
L'Etat n'assurant plus la garantie des approvisionnements, les importateurs
privés, qui obéissent à des principes mercantiles,
ne se substitueront pas à celui-ci pour constituer des stocks de
régulation pour prévenir une pénurie sur les marchés
mondiaux. C'est la sécurité alimentaire de Djibouti qui est
menacée.
Face à l'urgence de la situation, le pouvoir affiche son incapacité,
ou plus exactement son incompétence à sortir le pays de cette
ornière.
La table ronde avec les bailleurs de fonds Arabes qui a eu lieu au Koweït
a été une tentative de contourner le fonds monétaire
international et la Banque Mondiale, pour qui Djibouti est un mauvais élève.
En l'absence de parrainage des institutions de Bretton-Woods, les chances
de succès de cette table ronde sont minces.
De plus, les projets soumis aux bailleurs de Fonds Arabes ne sont pas de
nature a créer la dynamique de croissance et de développement
dont le pays a désespérément besoin. C'est bien de
construire des classes d'écoles et des logements sociaux ; mais,
hélas ! ce n'est pas la solution au problème. Avec quoi les
futurs locataires paieront-ils leurs loyers s'ils n'ont pas de salaires
?
Le pouvoir en place sous nos cieux n'a vraiment pas pris la mesure de la
gravité de la situation économique et sociale du pays, laquelle
appelle la mise en uvre rapide d'une politique de développement
des emplois en court terme. L'action de l'Etat doit être incitative
et favoriser la mise en place de petites unités de transformation
et de production agricole et industrielle, notamment dans le textile, la
pêche et d'autres secteurs de production à faible intensité
technologique. Le secteur privé doit être le moteur de cette
démarche de développement, lequel s'associera, compte tenu
de l'étroitesse du marché local, avec des opérateurs
économiques régionaux (du Yémen, de l'Ethiopie, du
Somaliland, de l'Erythrée) en vue de satisfaire la demande régionale.
Il s'agit de mettre en place rapidement une politique de substitution aux
importations, au premier chef pour les produits de base pour lesquels la
demande est potentielle.
Pour ce faire, l'Etat doit assouplir sa politique fiscale pour attirer les
investissements directs étrangers, adopter une politique des taux
d'intérêts raisonnable. Le niveau actuel des taux d'intérêt
débiteurs à Djibouti qui est de l'ordre de 16%, est carrément
anti-économique.
A titre de comparaison, relevons que les taux d'intérêts débiteurs
en France ou dans les pays de l'OCDE sont inférieurs à 7%.
Enfin, l'Etat, s'il jouissait d'un peu de crédibilité internationale,
pourrait demander des financements pour le compte des opérateurs
djiboutiens (y compris la Communauté Commerçante Française
de Djibouti) auprès des agences de coopération et de développement
telles que l'Agence Française de Développement (CFD), International
Developement Agency (IDA) ou encore auprès de l'UE/ACP.
Mais l'élaboration et l'exécution d'une politique économique
suppose, outre la connaissance des mécanismes économiques
par ceux qui sont censés la mettre en oeuvre, l'existence d'un environnement
général (politique, social, juridique, etc.) apaisé
et propice.
Il est triste de constater que la République de Djibouti s'enlise
dans le sous-développement et ses corollaires comme la pauvreté,
le malnutrition... à cause de l'inaptitude de ses dirigeants, eux-mêmes
qui agitent comme un épouvantail le désastre somalien dans
l'unique but de faire souffrir davantage le peuple djiboutien, déjà
meurtri jusque dans sa chair.
Mais il existe des limites qu'il faut se garder de franchir dans le bafouement
de la dignité humaine. Le drame de nos voisins somaliens devrait
donner matière à méditation, en premier lieu à
nos pseudos-dirigeants dont l'inconscience est à la hauteur de l'incompétence.
Les violentes émeutes populaires qui ont secoué le pays fin
mai-début juin et durant plusieurs jours, sont les prémices
d'un soulèvement aux conséquences aussi imprévisibles
que celles d'un volcan dont le magma remonte à la surface.
Le temps imparti à l'héritier de l'ancien dictateur est désormais
compté. Son cher vieil oncle claniste lui a fait un cadeau empoisonné.
Le compte à rebours est déclenché : 9, 8, 7, 6...
NECROLOGIE
FOUAD
AHMED MOUSSA N'EST PLUS
Fouad Ahmed Moussa
dit Sawahili est décédé samedi dernier des suites d'une
longue maladie.
Quadragénaire, Fouad était connu et apprécié
par ses concitoyens pour sa joie de vivre et son affabilité.
Le président du PRD Daher Ahmed Farah, le Bureau National ainsi que
les militants et sympathisants du Parti adressent leurs sincères
condoléances à la famille du défunt. Allah l'accueille
en son Paradis Eternel. Amin.
-------------------------------------------------
Sommaire 'Le Renouveau' ----------------------