LE
RENOUVEAU
N° 354 DU DIMANCHE 09 AVRIL 2000
Information
Si le ridicule
tuait...
Fin mars 2000. Le
pays entre en effervescence à l'annonce du retour du président
du Front pour la Restauration de l'Unité et de la Démocratie
(FRUD), signataire de " l'accord-cadre de réforme et de concorde
" du 7 février à Paris.
Le président
Dini et sa délégation reviennent donc au pays, après
une longue absence de neuf ans pour cause de résistance armée
à l'autocratie régnante. Ils rentrent en parfait accord avec
les autorités en place.
Le journaliste Ali
Barkad Siradj, qui assure alors par intérim les fonctions de rédacteur
en chef du journal gouvernemental la Nation, juge tout à fait de
son devoir d'annoncer cet événement national. Il passe à
l'acte et rédige un entrefilet, pour l'édition du lundi 27
mars 2000, où il informe lecteurs et lectrices du retour du président
Ahmed Dini Ahmed et de sa délégation.
L'article, très
bref, est intitulé " La paix des braves ".Objectif, il
se borne à inscrire cet événement dans l'accord-cadre
du 7 février 2000 à Paris et à rappeler fort sommairement
quelques éléments d'information sur le parcours politique
du président Ahmed Dini Ahmed et de son vice-président Chehem
Daoud Chehem. Rien de tendancieux ni même de laudatif donc.
Pourtant, cela déplaît
instantanément au Secrétaire Général à
l'Information, par ailleurs directeur de publication du journal la Nation,
qui sort de ses gonds. Prévenu en pleine nuit (par quelque âme
fidèle, semble-t-il), il débarque sur les lieux de travail
en deux temps, trois mouvements, et vide sa colère sur la journaliste
en chef auteur de l'article. Que le journaliste ait pris l'initiative (des
plus professionnelles) d'annoncer cet événement imminent dans
une édition à paraître la veille (en réalité
l'avant-veille en raison d'un changement de dernière minute), sans
lui en référer et en soumettre ensuite (en cas de feu vert,
s'entend) chaque phrase ainsi que chaque mot à sa censure, voilà
qui est grave, très grave même, à ses yeux. Cela dénote,
c'est clair pour le chef hiérarchique, un parti-pris pour l'opposition
de la part du journaliste. Ce que, selon nos informations, il ne se prive
point de le crier sur le champ. Avant de faire retirer l'entrefilet de l'édition
à paraître, ne soufflant ainsi mot sur le retour du président
Ahmed Dini Ahmed et de sa délégation. Heureusement qu'il y
à Le Renouveau et les communiqués de l'ODU pour s'en charger.
Stupéfait,
le journaliste, l'un des meilleurs de la maison, s'est donc exécuté
et a ôté du journal l'article en question. Mais il n'est pas,
pour autant, au bout de ses surprises. Dès le 29 mars 2000, c'est-à-dire
dès le jour du retour de la délégation du FRUD, il
se voit remettre une " demande d'explication " du Rédacteur
en chef en titre de la Nation qui lui demande de s'expliquer sur "
son acte"
Il lui demande de
lui expliquer " les raisons pour lesquelles il a tenté de publier
un article tendancieux de nature à nuire aux accords de paix auxquels
le gouvernement est parvenu. De plus, écrit-il, votre acte est aggravé
par la terminologie utilisée dans votre article, lequel ne comportait
pas votre signature, était sensé semer le doute dans l'esprit
de nos lecteurs et ainsi jeter les discrédit sur le journal "
Devant de telles
affirmations, l'on ne peut que rester coi de stupéfaction. A moins
d'être anormalement constitué, l'on ne voit pas en effet en
quoi ce bref article pourrait nuire aux " accords de paix auxquels
le gouvernement est parvenu ". Lisez-le plutôt dans son intégralité
et jugez-en:
" Le président
et le vice-président du FRUD M .Ahmed Dini et M. Chehem Daoud sont
attendus à Djibouti le 28 mars 2000, c'est-à-dire demain.
Ce retour au pays des dirigeants du mouvement armé fait suite à
l'accord-cadre de cessation des hostilités signé à
Paris avec le Gouvernement le 7 février 2000.
Monsieur Ahmed Dini,
qui fut dans les années 70 l'un des principaux acteurs de la lutte
pour l'indépendance, a occupé en 1977 le poste de premier
ministre dont il a démissionné avec panache six mois seulement
après sa nomination. Il est à la tête du FRUD depuis
1992.
Quant à M.
Chehem Daoud ancien ministre de la Santé du gouvernement Aref, il
est numéro deux du FRUD depuis 1994.
Cet accord de paix
ouvre donc la voie à un règlement définitif du conflit
interne déclenché en 1991 ".
L'on a beau lire
et relire cet article, rien n'apparaît qui soit susceptible de "
nuire aux accords de paix ", ni de" semer le doute dans l'esprit
des lecteurs ", encore moins de " jeter le discrédit sur
le journal ". Tout ce qui y est écrit est vrai, y compris la
date du retour qui, au moment où l'article est écrit, n'a
pas encore changé pour se fixer au mercredi 29 mars 2000.
Monsieur Dini et
son vice-président n'étaient-ils pas attendus à Djibouti
? Leur retour n'était-il pas officiel, annoncé notamment par
l'Opposition Djiboutienne Unifiée (ODU) et par le journal le Renouveau
? Ce retour au pays ne fait-il pas suite à l'accord-cadre de concorde
et de réforme signé à Paris le 7 février 2000
entre le gouvernement et le FRUD représenté par ces mêmes
Ahmed Dini et Chehem Daoud ? M. Dini n'a-t-il pas été dans
les années 1970 l'un des principaux acteurs de la lutte pour l'indépendance,
aux côtés de M. Hassan Gouled Aptidon ? N'était-il pas
en première ligne en ces temps-là dans le combat pour l'indépendance
? N'était-il pas avec Gouled à la tête de la LPAI ?
N'était-ce pas lui que nous applaudissions abondamment dans les manifestations
et autres meetigs de la LPAI ? Ne criions-nous pas :" Waa Dini iyo
Dinta : c'est Dini et Dinta (la réligion en somali) " ? Avec
tout ce que cela comporte de connotation positive. N'a-t-il pas été
en 1977 et pendant six mois, le premier Premier Ministre de la République
? N'a-t-il pas, avec courage, démissionné de ce poste dès
qu'il perçu les prémices de la future confiscation autocratique
de l'Etat ?
Quant à Chehem
Daoud, n'a-t-il pas été membre du gouvernement Aref avec le
portefeuille de la Santé ? N'est-il pas vice-président du
FRUD depuis plusieurs années maintenant ?
Et cet accord-cadre,
n'a-t-il pas pour raison d'être même de mettre fin au conflit
armé en restaurant la paix civile, la concorde nationale et la démocratie
sans lesquelles il ne peut y avoir de développement ? Ne sont-ce
pas là ses objectif clairement affirmés ?
Décidément,
l'auteur de la " demande d'explication " est à mille lieues
de convaincre du bien fondé de sa réaction. Il donne l'impression
de se gargariser de mots sans prise aucune sur la réalité
?
Mais au fait, qui
est derrière cette sortie contre l'accord-cadre de Paris, car ce
n'est point le journaliste culpabilisé, qui n'a fait que son travail,
mais ceux qui le lui reprochent qui nuisent aux " accords de paix auxquels
le gouvernement est parvenu " ? S'agit-il là de la simple exécution
d'une instruction venue du sommet de l'Etat ou de l'initiative de quelque
chefaillon craignant pour ses petits privilèges ?
Ce sont là
des questions qui méritent réponses de la part de qui droit.
A suivre.
ECONOMIE
LA CONTREBANDE S'AMPLIFIE A NOS FRONTIERES
La contrebande apparaît où l'économie va mal. C'est
l'un des symptômes d'un Etat malade où les agents économiques
trouvent plus avantageux de tourner la loi pour toutes sortes de raisons.
Symptôme, elle est aussi alerte et doit comme telle interpeller les
décideurs.
Dans notre pays,
la contrebande a toujours été un phénomène insignifiant.
Elle s'opérait plutôt, quand elle apparaissait, depuis le territoire
national vers les pays limitrophes. Signe que nos produits et nos prix étaient
jugés intéressants par les ressortissants voisins qui leur
faisaient franchir les frontières en contrebande pour éviter
la taxation.
Depuis quelques temps
maintenant, précisément depuis que notre économie est
en crise et nos produits chers du fait de l'inflation fiscale, le phénomène
s'est inversé. C'est vers nous que viennent les marchandises de contrebande.
Du Somaliland voisin mais aussi d'Ethiopie.
La contrebande a
pris une telle ampleur que le gouvernement a fini par en reconnaître
l'existence, allant jusqu'à mettre en place un dispositif de lutte
contre cette pratique. Dispositif regroupant les ministères de l'Economie
et des Finances, de la Défense, de l'Intérieur et de la Justice.
Le ministre de l'Intéreur s'est même transporté récemment
à la frontière avec le Somaliland, où la contrebande
s'est très développée ces temps-ci. Toutes sortes de
marchandises nous proviennent de l'Etat auto-proclamé, depuis les
cigarettes jusqu'au carburant en passant par les produits de beauté.
Et l'on ne compte plus les accrochages violents (à l'arme à
feu) entre les contrebandiers et les forces de police chargées de
la réprimer. Pas plus tard qu'il y a quelques jours, un véritable
combat a opposé policiers et contrebandiers armés du côté
de Chabelley.
Face au problème,
le ministre de l'Intérieur, nous apprend la Nation du 5 avril 2000,
a exhorté la population de la région frontalière côtière
du Sud (Doudah-Damerjog-Atar-Loyada) à faire preuve de vigilance
et de civisme. Il s'est contenté de cette exhortation, aurait dû
écrire la Nation, car le problème est trop grave pour être
traité par le seul verbe. Si le ministre s'imagine qu'il suffit d'aller
prêcher la bonne parole, au volant de sa rutilante grosse cylindrée
et dans une mise luxueuse, à une population à bout de souffle
à force de misère, il se fourvoie lourdement.
Interrogé
par Le Renouveau, un habitant de la région a eu ces mots : "
Ils viennent, puant l'argent public, oser nous donner des leçons
de civisme, à nous autres que leur mauvaise gestion accable de misère.
Comme le dit le proverbe djiboutien, ce n'est pas par hasard si la marmite
vient à ébullition ".
La contrebande n'est
pas tombée du ciel ni sortie de terre, elle a des causes objectives
qu'il faut avoir le courage d'admettre et de traiter. Il y a contrebande
parce qu'il y a demande. Le corps social -paupérisé à
force de chômage, de baisses et de retards de salaires (surtout dans
le secteur public)- n'arrive plus à acquérir sur le marché
local des produits sans cesse plus chers du fait de la hausse des taxes.
Il cherche alors d'autres sources, accessibles à ses maigres ressources,
d'où la contrebande. La contrebande vient du Somaliland parce que
dans cet Etat auto-proclamé, la pression fiscale est faible et les
marchandises d'autant moins chères. Comme aux Emirats Arabes Unis
où nombre de nos commerçants vont s'approvisionner.
Elle vient également
d'Ethiopie, avec ou sans la complicité des routiers éthiopiens
en provenance des Hauts Plateaux. Des produits tels que le carburant, l'alcool
populaire éthiopien, le café ou le têf (servant à
préparer la célèbre galette éthiopienne "
anjero " franchissent clandestinement la frontière éthio-djiboutienne
et s'écoulent à bon prix sur le marché national, quand
ils ne repartent pas pour d'autres destinations.
La contrebande offre
ce que n'offre plus l'économie officielle à un pouvoir d'achat
social fortement réduit : un bon rapport qualité-prix.
Voilà pourquoi
il devient tentant, pour des particuliers mûs par l'appât du
gain, de se lancer dans le commerce illicite. Et que cela marche...
Mais il n'y pas que
les contrebandiers individuels qui opèrent, mais aussi et surtout
les gros importateurs qui trouvent dans la contrebande une nouvelle source
d'approvisionnement. Selon nos informations, moyennant bakchich à
qui convient, des tonnes de marchandises de toutes natures franchissent
de nuit la frontière pour garnir les rayons et autres stocks de la
place. Il faut dire que lorsque ceux-là mêmes (civils ou en
uniforme) censés combattre la contrebande, ne sont pas payés
depuis sept mois, l'argument sonnant et trébuchant peut permettre
des prouesses pour les inconditionnels du profit substantiel.
Comment alors soigner
ce symptôme ? En soignant la maladie, c'est-à-dire en l'attaquant
aux racines. Et l'attaquer aux racines, c'est mettre fin à la crise
économique et à l'inflation fiscale. Or, une crise économique
telle que la nôtre puise ses causes dans le système de gouvernement
créé et entretenu par le régime en place. Elle est
liée à la logique de prédation, de pouvoir personnel
et de dépenses injustifiées. Elle est liée à
l'environnement d'incertitude politique, de non-droit et de guerre civile.
Le redressement économique
ne peut donc s'opérer sans paix civile et sans concorde nationale,
sans démocratie et sans droits de l'Homme, ni sans bonne gouvernance.
Toutes conditions élémentaires nécessaires au renouveau
démocratique et à la reconquête de la crédibilité
internationale.
Loin d'être
un phénomène superficiel, la contrebande galopante dont nous
gratifient nos frontières est un symptôme sérieux du
mal profond qui secoue notre pays. Et pas seulement un symptôme de
plus...
MONDE
SOMMET AFRIQUE-EUROPE:
LA DEMOCRATIE ET LES DROITS DE L'HOMME AU CUR DES TRAVAUX
Au cur des travaux du premier sommet Afrique-Europe qui s'est tenu
au Caire en Egypte lundi 27 et mardi 28 mars 2000 derniers, la démocratie
et les droits de l'Homme ont été au centre des discussions.
Encore une fois, les débats ont fait ressortir le caractère
vital de l'enracinement démocratique et du respect des droits de
l'Homme ainsi que de la bonne gouvernance pour les peuples. Il ne peut en
effet y avoir véritable développement sans liberté,
c'est-à-dire sans protection des droits sacrés de la personne
humaine. Le développement étant, faut-il le rappeler, pour
et par la personne humaine.
Dans un pays démocratique,
où la liberté est garantie sous toutes ses formes (pensée,
conscience, opinion, expression, réunion, association, etc.), l'exercice
du pouvoir d'Etat ne peut se faire comme le veut celui ou celle qui le détient
à un moment donné. Il est soumis à la vigilance nationale
et au contrôle démocratique. Qu'il s'éloigne du droit
chemin, du programme pour lequel il a été élu, et la
sanction populaire tombera. L'opposition démocratique, la presse
libre, la société civile... sont autant de forces, ne l'oublions
pas, qui participent à l'exercice démocratique. D'où
découle l'exercice citoyen de la politique.
La bonne gouvernance
elle-même, qui commande que l'on mette l'homme qu'il faut à
la place qu'il faut et que l'on respecte les règles et critères
républicains, cette bonne gouvernance n'est réellement possible
que grâce au contrôlé démocratique. L'homme est
ainsi fait qu'il a besoin d'être encadré et contrôlé
pour agir positivement. C'est pourquoi la démocratie a été
inventée par l'homme et que la séparation des pouvoirs y a
été organisée. Le pouvoir doit arrêter le pouvoir,
écrivait Montesquieu, grand philosophe français du XVIII ème
siècle.
Voilà pourquoi,
au grand dam des derniers autocrates encore au pouvoir en Afrique, d'ailleurs
tous en difficultés, la démocratie et les droits de l'Homme
et leur corollaire la bonne gouvernance ont encore ravi la vedette aux autres
sujets.
Bien sûr, la
question de la dette a également été évoquée
et son allégement promis, mais non sans que le lien étroit
entre le niveau de l'endettement et le déficit de démocratie
et de bonne gouvernance ait été clairement établi.
En effet, et ce n'est un secret pour personne, le fardeau de la dette tant
mis en avant par les autocrates africains, est la conséquence de
la mal-gouvernance et du déficit démocratique. S'il y avait
eu un véritable contrôle démocratique, l'avenir des
peuples d'Afrique (et d'ailleurs dans le reste du monde en développement)
n'aurait pas été hypothéqué par un endettement
douteux qui a trop souvent servi à entretenir le train de vie scandaleux
des régimes autocratiques et à enrichir leurs dignitaires.
Que d'" éléphants blancs " coûteux gisent
à travers la terre d'Afrique ! Que des milliards se sont volatilisés
aux dépens des peuples en survie difficile !
L'on comprend, dès
lors, que devant l'échec cinglant de la pensée unique et du
parti unique, le monde développé, qui sait de quoi il parle
pour avoir su tirer le plus grand profit de la démocratie et des
droits de l'Homme, nous rappelle à l'évidence.
Alors vive la démocratie,
protectrice des droits de l'Homme et garante de la bonne gouvernance et
du développement.
HYDRAULIQUE
L'eau potable
inégalement repartie
L'eau est une ressource
renouvelable (via le cycle de l'eau, soit 1 385 985 km³) mais ses réserves
ne sont pas pour autant illimitées. Les experts prédisent
que toutes les eaux de surface seront consommées d'ici 2100 et que
toute l'eau disponible dans le cycle de l'eau de la terre sera entièrement
épuisée d'ici 2230"
L'eau est un problème
posé à l'échelle du globe et dont la résolution
commande le devenir des sociétés : sans elle, pas de vie ni
développement.
Sans céder
au catastrophisme, il faut pourtant constater que les ressources se raréfient
en maintes régions, que le niveaux des réserves baisse, que
la population est largement répandue et que la désertification
avance.
Si la population
du globe a été multipliée par trois au cours de ce
siècle, la demande en eau, elle, a été multipliée
par sept et la surface des terres irriguée par six.
Au cours des cinquante
dernières années, la pollution des nappes aquifères
a réduit les réserves.
L'eau est une source
finie, inégalement répartie dans le temps et l'espace. Un
habitant des Etats-Unis utilise 700 litres d'eau par jour, un Africain doit
se contenter de 30 litres, contre 200 litres par jour pour un Européen
et 20 litres pour un Haïtien.
En moyenne, un Israélien consomme quatre fois plus qu'un Palestinien,
conformément aux accords de Taba (dit Oslo II) signé à
Washington le 28 septembre 1995 entre l'Autorité Palestinienne et
l'Etat hébreu. Cet accord officialise le partage léonin des
aquifères de Cisjordanie : 82% aux Israéliens et 18% seulement
aux Palestiniens, soit 260 litres pour un Israélien et 70 litres
pour un Palestinien. Lors des négociations, Israël refusa d'attribuer
plus d'eau aux Palestiniens, arguant qu'ils pouvaient être alimentés
par le Nil.
Cette suggestion
a été considérée comme une provocation belliqueuse
par les Egyptiens.
Le gouvernement de
l'Afrique du Sud s'est fixé comme première priorité
la fourniture d'au moins 25 litres d'eau par jour (pour les besoins de l'hygiène)
à chacun de ces citoyens en abordant la question sous l'angle de
la dignité et de l'équité.
L'agriculture absorbe
les deux tiers de la consommation mondiale d'eau, mais elle doit compter
avec l'intense concurrence des activités des villes, plus particulièrement
dans les pays émergents.
Les problèmes
de l'eau ne sauraient être traités isolément : ils doivent
être intégrés dans les schémas de développement
économiques et sociaux, afin d'assurer les besoins humains fondamentaux
et de préserver les écosystèmes.
Ce qui est en jeu,
c'est la sécurité alimentaire, la santé des populations,
la paix et la stabilité du monde. L'ONU recense environ 300 zones
potentielles de conflits.
Pour ne prendre que
des exemples des sphères régionales, tels que le conflit Israëlo-Arabe,
vieux d'une cinquantaine d'années, la question s'éclaire d'elle-même.
L'argument de début
du mouvement sioniste était de reconquérir la terre promise
(Galilée, Judée et Samarie). A partir de 1967, est apparu
l'argument de la sécurité (contrôler le terrain pour
empêcher les attaques.). Et à l'aube du 3éme millénaire,
vient l'argument de l'eau. Shimon Perès le résumais ainsi
: " Nous avons deux mers : l'une est morte ( Mer Morte), et si nous
abandonnons l'autre ( Mer de Galilée), c'est du suicide ". Dans
une de ses dernières déclarations, Yitzahak Rabin avait affirmé,
à propos du Golan, qu'Israël avait besoin de garanties les plus
solides " car pour le peuple israëlien, l'eau est beaucoup plus
importante que la paix".
L'autre guerre majeure
de l'eau dans la région, mais cette fois en Afrique, est celui du
Sud-Soudan qui oppose les rebelles sudistes au pouvoir de Khartoum. La toile
de fond de cette guerre est le conflit entre l'Ethiopie et l'Egypte à
propos du partage des eaux du Nil. L'Ethiopie apporte son soutien aux rebelles
du Sud-Soudan et singulièrement dans l'attaque du chantier du Canal
de Jonglai, un projet egypto-soudanais, qui consiste en la constitution
d'un canal sur le Nil près de la frontière soudano-éthiopienne.
L'interaction entre
conflits de l'eau et conflits géostratégiques accroît
le risque d'affrontement armé dans la mesure où les intérêts
vitaux des pays sont en jeu. Mais à terme, elle peut aussi contribuer
à démilitariser les conflits par le biais de solutions techniques.
Des solutions techniques qui du reste s'avèrent limitées dans
un avenir proche :
- faible quantité
d'eau récupérée par le traitement des eaux usagées.
Un litre d'eau d'une rivière française est recyclé
jusqu'à six fois. Dans les pays du Sud, il sert une fois ;
- coût prohibitif
du dessalement de l'eau de mer.
Cette dernière
entreprise suppose évidemment qu'on invente un système économiquement
compétitif de dessalement de l'eau.
Pour le moment, il
n'y a que l'Arabie Saoudite et le Koweït qui sont partis le plus loin
dans l'expérimentation du dessalement vu que l'énergie est
très bon marché. Certes, séparer le sel de l'eau ne
pose pas de problème. Ce qui est difficile, c'est, après les
avoir séparés, de retenir l'eau et non le sel. Il semble ridicule
que nous soyons encore incapables de séparer à bas prix le
sel de l'eau de la mer. Mais, nous diriez-vous, pour diminuer le coût
actuel de telles opérations, pourquoi ne pas essayer la solution
écologique : il s'agirait d'utiliser l'énergie solaire puisque
la région Mer Rouge se prête idéalement au captage de
l'énergie solaire. L'utilisation de l'énergie solaire reste
pour l'heure limitée et dépend de découvertes scientifiques
encore aléatoires.
Force est de constater
qu'aussi bien la Turquie et le Golan syrien pour le Proche Orient que l'Ethiopie
pour les pays du Nord-Est Africain, représentent de véritables
châteaux d'eau .Alors pourquoi se concentrer sur le dessalement de
l'eau de mer plutôt que sur la redistribution des eaux disponibles
à l'échelle des pays de la région ?
Ce qui est particulièrement
inquiétant, c'est que dans cette région, l'interaction entre
questions hydropolitiques et les facteurs géopolitiques (impératif
politique de l'autosuffisance agricole, absence de marché commun
et d'approche commune du développement) empêche la recherche
de nouvelles sources d'eau potable.
L'adoption d'une
coopération régionale pour exploiter les ressources existantes,
nous évitera le pire des scénarios, qui peut se produire si
l'on considère l'équation croissance démographique-tarissement
des sources. La population de la région aura doublé d'ici
vingt ans, les sources aquifères ne sont pas renouvelables, le niveau
pluviométrique diminue et l'évaporation s'intensifie, alors
que l'agriculture, qui consomme entre 75 et 90% de l'eau disponible, est
soit trop archaïque et dispendieuse, soit trop ambitieuse, soit d'une
préservation défectueuse (pollution, mauvais entretien des
infrastructures, etc.).
Les solutions sont
donc autant politiques que développementales. La communauté
internationale ayant un grand rôle à jouer dans la sauvegarde
et la préservation des ressources hydrauliques.
Dès lors,
il semble que l'implication des acteurs internationaux : O.N.U., Union Européenne,
Etats-Unis, Banque mondiale, devient nécessaire à l'instauration
de dynamiques régionales de paix et de coopération. Sans pour
autant renoncer à rêver d'un organisme qui régulerait
la gestion mondiale de l'Eau.
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